C’est l’affaire SoLocal, peu reluisante en soi, qui m’a fait réfléchir à un aspect moins connu du rôle de l’argent. De toutes façons, vous connaissez déjà mon diagnostic : il y a trop d’argent dans le monde, beaucoup trop et ça explique quantité de problèmes que nous rencontrons. Problèmes liés en particulier aux fonds de placement qui sont les entreprises auxquelles des particuliers ou des institutions confient de l’argent pour le multiplier.
Revenons à SoLocal, société dans laquelle plusieurs actionnaires sont des fonds de placement. Les actionnaires sont ceux qui se partagent les bénéfices, mais aussi, en cas de liquidation, qui risquent de perdre leur mise. Or donc SoLocal ayant besoin d’argent, ses actionnaires ont apporté de l’argent, non pas en actions mais en crédit. Ils deviennent alors, pour ces sommes-là, des créanciers. Les créanciers sont ceux qui, en cas de liquidation, sont remboursés en tout ou partie avec la vente des actifs subsistants. Bien, jusque là ça ressemble au vieil adage qui dit de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Mais évidemment ces gens-là ne cherchent pas à gérer leurs actifs comme de bons pères de famille mais à faire de l’argent, plus d’argent, toujours plus d’argent et par n’importe quel moyen.
Et donc voilà que SoLocal devient un champ de bataille, puisque à la fois ces fonds de placement connaissent très bien la société pour en être actionnaires et en même temps, en tant que créanciers, ils réclament devant les tribunaux le remboursement de leur crédit. Si la balance de leur intérêt penche vers la liquidation ils l’obtiendront et si au contraire elle penche vers la continuation, ils l’obtiendront aussi. C’est comme ça que le destin d’un entreprise ne dépend plus d’elle-même. Tout cela étant bien sûr parfaitement légal.
Cependant ce n’est possible que parce qu’il y a trop d’argent. Bien sûr vous allez me dire que seuls les riches ont de l’argent à placer et donc abondent les fonds de placement. Eh bien pas du tout, presque tout le monde est concerné. En effet, quand une banque vous propose de placer ne serait-ce que 50 €, eh bien cette somme va dans ses propres fonds de placement et vous vous retrouvez, sans le savoir, actionnaire ou créancier par exemple de SoLocal.
Bien sûr, rassurez-vous, seuls les riches et les institutions financières ont du pouvoir dans ces mécanismes. Mais il s’agit-là d’un cercle vicieux puisque l’argent produit toujours plus d’argent et donc ceux qui en ont prennent de plus en plus de «risques» pour le faire fructifier. Et c’est comme ça qu’il y a trop d’argent. Mais alors est-ce que, comme l’impôt, trop d’argent peut tuer l’argent ? En tous cas pas pour le moment, tant que les politiques jouent l’argent gagnant. Ce qui serait nouveau c’est qu’ils jouent le citoyen gagnant, ou rêvons un peu, la démocratie gagnante, ce pour quoi, à priori, ils étaient faits. Mais ça c’est à nous de le leur rappeler.
Michel Costadau
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